Analyse Les dérives du football business accentuées : "Nos vies valent plus que leurs intérêts économiques"

Antoine Arnould
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Les dérives du football business accentuées : "Nos vies valent plus que leurs intérêts économiques"
Photo: © photonews

L'arrêt des championnats apeure les détenteurs des droits TV et toute l'industrie du ballon rond. D'autres font le point sur l'état du football. Les intérêts économiques d'une poignée doivent-ils décider du sort de la passion de tant d'autres, questionne un supporter légendaire de l'Atalanta.

19 février, l’Atalanta bat Valence 4-1 en quarts de finale pour sa première participation à la Ligue des Champions. En raison de travaux dans son stade, la Déesse emmène 45.000 supporters au San Siro de Milan, soit plus du tiers de la population bergamasque. Quelques jours plus tard, Bergame devient la deuxième ville au monde la plus touchée par le coronavirus.

Les camions militaires viennent emmener les cadavres, et avec eux « nos souvenirs les plus chers partent, tout comme une grande partie de l’Histoire de notre ville, où tout le monde pleure ses morts sans un dernier au revoir, sans préavis » constate, la plume tremblante, Claudio Bocia, ultra iconique de l’Atalanta.

L’Eco di Bergamo parle de 4.500 décès rien que dans sa province. Alors que la ville lombarde de Codogno était déjà en quarantaine, Bergame continuait de vivre. En tout cas, son activité économique. Bergame est l’une des régions les plus prospères d’Italie et il n’était pas du goût des gouvernements, ni des plus grosses entreprises, de fermer boutique : « Les propriétaires de grandes entreprises de la région ont davantage pensé à la productivité plutôt que de préserver de la contagion leurs concitoyens, leurs propres travailleurs », enrage Bocia, dans une lettre qui l’envoie au Président de son club de cœur.

Et la légende de la Curva Nord de dénoncer : « Puis, à la télévision, vous voyez qu’ils parlent et discutent. Ils se disputent sur quand reprendre le championnat. Et, inévitablement, nous parlons d’argent, des droits télévisions, des salaires, des revenus,… de cet argent maudit qui détruit le sens et la valeur d’une vie ! ».

Dans ce contexte, se chamaillent joueurs et dirigeants du Barca sur une réduction d’un salaire habituellement 100 à 1.000 fois plus élevé que celui d’une infirmière. Dans ce contexte, « de ville[s] qui souffre[nt], à genoux, et qui se batte[nt] chaque jour contre la mort atroce et douloureuse », les grands groupes TV veulent forcer, d’une manière ou d’une autre, la poursuite des championnats. Dans ce contexte, « où vous voyez votre peuple s’en aller seul, avec des chars de l’armée, pour être incinéré dans d’autres villes », l’intérêt économique de ceux qui ont surchargé les calendriers footballistiques, à tel point qu’il est devenu impensable de terminer les championnats avant le 30 juin sans mettre en péril la santé des joueurs, devrait passer avant la santé des gens.

Dans ce cas-là, conclut Claudio Bacio, « Bergame et ses habitants passent avant notre équipe, […] avant n’importe quel intérêt économique ». Et l’ultra bergamote de demander, au président de l’Atalanta de déclarer forfait, car il y aura toujours le temps d’aller voir l’Atalanta par après.

Mais, « ne pensons pas que retourner voir l’Atalanta équivaudra à revenir à la normale ». Et si, ne pas revenir à la normale consistait à donner plus d’importance à la parole des supporters qu’à ceux qui font du football une simple marchandise ?

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