Analyse "Ultras" : le Napoli et l'Italie en toile de fond d'une réussite signée Netflix

"Ultras" : le Napoli et l'Italie en toile de fond d'une réussite signée Netflix

Ce vendredi est sorti le film "Ultras", portrait crépusculaire du monde particulier des ultras du Napoli. Un film qui divise, surtout chez les ultras eux-mêmes, mais qui vaut clairement la peine d'être vu. Chronique ...

Dès les premières images, Netflix et Francesco Lettieri préviennent : "Les groupes d'ultras partenopei n'ont pas participé à la réalisation de ce film". Un aveu, d'emblée : tout ce qui est décrit dans Ultras est une fiction, une dépiction (très) approximative de ce qu'est la vie d'un ultra (à Naples ou ailleurs), et tout ultra en contestera l'authenticité. Si vous cherchez une plongée 100% réaliste plutôt que romancée et un brin hollywoodienne dans ce monde à part, il y a probablement mieux ailleurs ; Ultras aurait peut-être dû s'appeler autrement - Napoli aurait été un beau nom, mais moins vendeur. Passons. 

Le football en toile de fond 

L'histoire d'Ultras peut se résumer à un choc des générations : Sandro Mohicano est un ultra de l'ancienne génération, fondateur du groupe des Apaches dont la plupart des piliers sont interdits de stade. Il tente de s'éloigner de "son" Napoli, assiste de loin à la radicalisation de la nouvelle génération d'ultras, plus violente. 

Si les liens - avérés - entre la Camorra et les supporters napolitains ne sont absolument pas évoqués dans ce film, une chose est commune aux deux : l'impossibilité de réellement tourner le dos à l'un comme à l'autre, et Sandro va le découvrir au long d'un film qui se centrera sur l'humain plus que sur le football (pas une seule scène en match, ce que certains regretteront). Se sentant coupable du décès d'un jeune ultra (inspiré d'un fait réel, le meurtre de Ciro Esposito, supporter de Naples tué par un supporter de la Roma en 2014), Mohicano tente d'aider Angelo, frère du défunt, à s'intégrer à un univers qu'on devine pas vraiment fait pour lui. 

La relation entre les deux hommes porte un film aux allures de tragédie sur fond de Vésuve et de baie de Naples, magnifiquement mis en images et en musique. La bande-son, d'ailleurs, représente par moments cette fracture générationnelle - comme lorsque le classique Caruso de Lucio Dalla est suivi d'un titre de Liberato, nouveau porte-étendard de la musique napolitaine (et compositeur du thème du film). Les has-been fondateurs des Apaches face à la nouvelle vague, menée par des leaders remplissant tous les clichés - tatouages et allure de néonazi compris. 

Aniello Arena, l'anti-héros 

Au milieu de ce drame crépusculaire, les acteurs brillent ; si vous parlez ou comprenez l'italien, soyez prévenus - on parle napolitain ici, et c'est très différent. Mais c'est ce qui fait la saveur et l'identité d'Ultras, dont ressort un homme, incroyable : Aniello Arena, qui campe l'anti-héros Sandro Mohicano et est un anti-héros lui-même. Arena est un ancien de la Camorra, condamné à perpétuité pour triple meurtre en 1991 et qui a trouvé la rédemption via le théâtre et les productions cinématographiques - il dispose d'une semi-liberté pour s'y adonner. 

Son histoire se confond avec celle de son personnage, systématiquement tiré vers le fond par un passé aux allures de tache indélébile. Dans un final coup de poing, qui renvoie en négatif à la première scène du film, Ultras nous laisse la gorge nouée. Moins gratuitement violent que Hooligans, clairement décevant pour ceux qui espéraient un portrait vivant et un hommage réel à la culture ultra, le film de Francesco Lettieri est une métaphore triste du temps qui passe, une déclaration d'amour à la baie de Naples et, tout de même, un rappel que le football est pour certains une question de vie ou de mort - voire "bien plus que ça", comme le disait célèbrement Bill Shankly. 

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