Interview Entretien avec Karim Belhocine : "J'accepterai un projet s'il me correspond sportivement et humainement"

Entretien avec Karim Belhocine : "J'accepterai un projet s'il me correspond sportivement et humainement"
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Il s'est fait discret depuis la fin de son aventure à Courtrai : Karim Belhocine n'est pas un amateur d'interviews. Mais l'ancien coach du Sporting Charleroi et du KVK a accepté de répondre à nos questions.

Karim Belhocine (44 ans) a vécu deux expériences frustrantes d'affilée : à Charleroi comme à Courtrai, il a souffert d'une seconde saison très difficile après des débuts remarquables. Peu amateur du jeu médiatique, il a cependant accepté de répondre à nos questions et d'évoquer son avenir. 

Bonjour Karim. Tout d'abord, comment allez-vous ? Avez-vous digéré votre fin d'aventure à Courtrai ?

Digéré, oui, depuis un bout de temps. Bien sûr, j'ai pris un peu de temps pour moi et pour la famille, mais je suis resté actif, je me suis occupé. Il y a toujours des choses à apprendre, à approfondir, des matchs à regarder en Belgique et ailleurs. Mais j'ai très vite digéré, je ne m'appesantis pas sur le passé.

La situation du KVK ne s'est pas vraiment améliorée. Au final, après un mieux la saison passée (comme lors de votre première saison...), Still a aussi été licencié à Charleroi et les Zèbres vont mal. Qu'est-ce que ça t'inspire ? Que tu n'étais pas « le » problème, mais que te licencier était la solution à court terme ?

Je ne suis vraiment pas du genre à analyser tout ça. Je n'ai pas pour habitude de critiquer les clubs où je suis passé car ça sonne vite comme si je pointais du doigt les responsabilités des autres, et ce n'est ni mon envie ni mon style. Mais avec du recul, je peux dire qu'un schéma s'est répété à Charleroi et Courtrai. Avec Charleroi, nous finissons troisièmes ; malheureusement, le Covid interrompt la saison, mais le résultat était là – record au classement, record de points, Europe...puis, on commence la saison suivante avec un 18/18. Certains parlaient de Charleroi champion. Et pourtant, moi, je tirais déjà la sonnette d'alarme. On m'a pris pour un fou ! Mais il y avait des choses à améliorer, à surveiller. C'est difficile de se faire entendre dans ces situations car l'atmosphère est si positive. L'élimination en Europe, aussi, a mis un coup à certains jeunes dont c'était le rêve, à certains joueurs restés malgré des offres dans le but de la jouer.

Quand tout va bien et que tu tires la sonnette d'alarme, on te prend pour un fou 

À Courtrai, le schéma était comparable. J'ai repris le club en octobre, et après une superbe série, en décembre, nous étions quasi-maintenus ! Il ne manquait que quelques points. Ca n'arrive jamais au KVK. Résultat, et c'est logique, je ne les blâme pas : comme le maintien était assuré, le club n'a pas forcément renforcé l'équipe. J'avais pourtant là aussi prévenu qu'il fallait se renforcer en vue de la saison prochaine, qu'il ne faudrait pas toucher à la défense , notamment, où l'alchimie était idéale. On a revendu Gilles Dewaele, Gueye s'est blessé... Courtrai est un club qui survit en revendant ses joueurs, je ne les blâme pas, et je prends ma part de responsabilités aussi, mais c'est le genre de choses qui complique la seconde saison. C'est du passé. J'ai la grande chance d'avoir quitté mes clubs précédents en très bons termes et c'est le plus important pour moi.

On sait qu'en Belgique, le carrousel des coachs est permanent, mais votre nom est peu cité... Il y a une volonté de rester en retrait du football belge de votre côté ?

Non, c'est juste comme ça que je suis. Je n'aime pas parler, me mettre en avant, donner des interviews, même. Et comme vous l'avez dit : j'ai été peu cité, c'est comme ça. Il y a des raisons à cela. Je ne cherche pas l'attention. Les clubs avec lesquels j'ai travaillé me connaissaient bien : le coach,mais aussi l'humain. C'est le plus important pour moi, l'aspect humain.

Belhocine Karim
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Votre nom avait notamment été cité à Brest...info ou intox ?

Info. C'est vrai, il y a eu des contacts, mais ils ont fait un autre choix, et un bon choix, donc tant mieux pour eux !

J'imagine quand même que l'envie est toujours présente et que vous avez « faim » après tant de mois.

Bien sûr, l'envie est là. Le football, c'est ce qu'on aime, pas seulement moi mais vous en tant que journaliste, les dirigeants des clubs, tous les coachs. On vit pour ça. Mais il faut que le projet me corresponde. J'ai eu des offres en Belgique, pas en D1A mais en Belgique ; je n'ai pas accepté car le projet ne m'intéressait pas. Sportif ou humain. Cela dit, on ne va pas se mentir, quand tu es jeune entraîneur, tu n'as pas toujours la chance de choisir ton projet : c'est parfois le projet qui te choisit. Et souvent, c'est aussi un coup de chance quand ça vient à vous et que ça colle. Aujourd'hui, même si c'est parfois dur, je pense qu'il vaut mieux attendre quelque chose qui vous correspond. Parce que vos échecs vous définissent vite quand vous commencez votre carrière.

Vous êtes un jeune coach, mais la jeune génération a tendance à parler datas en permanence, ce que vous n'avez jamais vraiment fait. Ce n'est pas votre truc ?

(rires) J'en utilise, comme tout le monde. Qu'on n'en parle pas ne signifie pas qu'on ne les utilise pas. Tout le monde travaille avec, et pas qu'en D1. Les statistiques de courses, l'intensité des efforts, les trackers GPS sur les joueurs pour monitorer leurs performances, tout ça, c'est généralisé. Vous parlez de jeunes coachs mais Marc Brys et Hein Vanhaezebrouck, pour ne citer qu'eux, en font tout autant usage que cette jeune génération, je peux vous l'assurer. Déjà quand j'étais joueur, Hein Vanhaezebrouck me parlait de mes statistiques et de mes datas ! C'est juste qu'ils n'évoquent pas tout le temps ça. Alors, est-ce utile, oui, est-ce important, oui. Les utilise-t-on plus qu'avant ? Probablement. Mais ce n'est pas nouveau. Et ça ne veut pas tout dire. L'humain est important aussi, et j'en ai toujours fait ma priorité en tant que coach.

La Belgique a récemment désigné un sélectionneur très jeune. Et l'Afrique a récemment, retrouvé le plaisir des sélectionneurs « nationaux », avec Belmadi en Algérie, Regragui au Maroc...vous avez ce côté « meneur d'hommes »qui pourrait fonctionner chez un sélectionneur, non ?

C'est drôle parce que récemment, Moussa El Abchi, l'analyste vidéo du Maroc que j'ai connu à Anderlecht, m'a fait la réflexion, en faisant la connaissance de Walid Regragui : « Karim, je te jure, vous êtes les mêmes » (rires). On a tous été supporters du Maroc pendant cette Coupe du Monde, et en tant qu'entraîneur algérien, ça me plairait de contribuer au développement du football africain, bien sûr. Je crois qu'à une époque, j'étais le seul coach africain ou d'origine africaine en D1 en Europe, je me trompe peut-être. Sauf Zizou, mais il est hors-catégorie (rires). Maintenant, j'imagine qu'en posant cette question, vous pensez à l'équipe d'Algérie, et en ce moment, il y a un coach qui fait un boulot extraordinaire. Djamel Belmadi est un entraîneur que je respecte immensément et qui est encore là pour un petit temps. Mais bien sûr qu'à terme, tout entraîneur africain ou d'origine africaine rêve d'entraîner son pays. Ce n'est même pas un objectif, c'est un rêve. Et à court terme, on verra si un projet se présente en Europe et qui me corresponde...

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