Interview Marcel Ansenne, le jeune Belge de 14 ans à qui Pelé a proposé de rejoindre le Brésil

Marcel Ansenne, le jeune Belge de 14 ans à qui Pelé a proposé de rejoindre le Brésil
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La légende brésilienne du football nous a quittés à l'âge de 82 ans. Pelé avait un attachement particulier à la Belgique, comme nous l'évoquent Marcel Ansenne, en compagnie de son frère Claudy. Alors qu'il n'avait que 14 ans, le joueur de Santos lui avait proposé de le rejoindre au Brésil.

Fort de 3 Coupe du Monde et de 1 283 réalisations, Pelé nous a quittés la semaine dernière à l'âge de 82 ans. La légende brésilienne du football, considéré par certains comme le meilleur joueur de tous les temps, avait un attachement particulier à la Belgique. Aux alentours des années 1973-1974 (vous allez comprendre l'imprécision volontaire), Edson Arantes do Nascimento était en visite à l'intérieur de nos frontières et plus précisément à Liège. Tout cela grâce à un homme : Lucien Levaux. L'ancien homme fort du Standard, avec lequel le club liégeois a connu ses plus grands succès européens, était un grand ami de Pelé. C'est d'ailleurs lui qui lui a fait signer son célèbre partenariat avec la marque Puma. 

"Monsieur Levaux était le représentant exécutif de la firme Puma, ici en Belgique. Alors que la légende brésilienne est sponsorisée par Adidas, il est allé personnellement le trouver pour lui proposer de signer avec Puma. Puisqu'aucun joueur n'avait d'agent à l'époque, Pelé était libre de prendre la décision. Il a accepté" nous conte Marcel Ansenne. "C'est d'ailleurs grâce à Lucien Levaux que Pelé a participé au jubilé de Paul Van Himst, que l'on appelait le Pelé blanc."

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Mais qui est donc Marcel Ansenne ? Alors âgé de 14 ans, le jeune joueur de la Royale Entente Blegnytoise est approché par le triple champion du Monde, qui lui propose une carrière de footballeur au Brésil. "Je vous avoue que je ne me rappelle plus la date exacte. Cela fait environ 50 ans, j'en ai désormais 64. Cela a donc dû se dérouler pendant les années 1973-1974. Ma mère était la dame de ménage de Monsieur Levaux. Un beau jour, quatre joueurs de l'équipe nationale brésilienne alors triple championne du Monde passent un séjour chez Lucien Levaux, dans le petit village de Feneur : le gardien Félix, le capitaine Carlos Alberto, le milieu de terrain Jairzinho et Pelé. Pour diner, nous sommes invités avec ma famille et d'autres joueurs historiques, comme Johan Cruyff. Nous dinons, et Monsieur Levaux parle de moi à Pelé" nous explique Marcel Ansenne, à présent âgé de 64 ans. 

Si tu veux, tu peux revenir avec nous. La seule condition est que tu dois rester ici pendant 5 ans"

La suite sort tout simplement de l'ordinaire. Dans sa grande bonté, Pelé propose à Marcel Ansenne... d'intégrer son école de jeunes, au Brésil. "Si tu veux, tu peux retourner avec nous pour intégrer l'école de jeunes. La seule condition est que tu dois rester ici pendant cinq ans. Le programme était d'aller à l'école en matinée et de jouer au football l'après-midi. Si je perçais, cela aurait été chouette. Mais dans le cas contraire, je devais payer le voyage retour pour rentrer en Belgique" nous raconte l'homme qui était alors apprenti boucher. "Je devais répondre dans les jours suivants, avant qu'ils ne repartent. Mes parents n'ont jamais accepté cette opportunité. Ils avaient peur que cela ne donne rien. Il est vrai que professionnellement parlant, il était plus sûr pour moi de poursuivre ma carrière de boucher."

Cette anecdote, le frère de Marcel Ansenne, Claudy, s'en rappelle très bien. "Connaissant Monsieur Levaux, il ne l'aurait jamais laissé revenir par ses propres moyens. C'était quelqu'un de très discret. Chez lui, il y avait deux salons. La premier était sa pièce de vie et le deuxième lui servait à recevoir des invités. Dans ce second bureau, il y avait une photo de moi sur les genoux de Pelé. Il n'a jamais voulu me la remettre, car il ne voulait pas exposer publiquement son attachement avec Pelé et les relations dont il jouissait. J'aimerais bien la retrouver aujourd'hui, mais je n'en ai jamais eu l'occasion. Entre 30 et 50 personnes étaient présentes, dont le commentateur Roger Laboureur et l'ancien secrétaire général du Standard Roger Petit. Les seules personnes présentes qui ne venaient pas vraiment du milieu du football, c'était mes parents et moi. Je n'étais encore qu'un gamin, c'était incroyable d'avoir ces joueurs à quelques mètres de moi."

Grâce à son haut poste chez Puma, Lucien Levaux avait le bras long. Dans les années 1970, tous les plus grands contrats de sponsoring passaient par lui. "Chaque joueur qui évoluait avec un équipement Puma était désigné par une couleur différente. L'insigne Puma sur les chaussures de Pelé était jaune, tandis que celui présent sur les chaussures de Johan Cruyff était orange. Il sponsorisait également les plus grands joueurs du Standard et du RFC Liège, comme le gardien Christian Piot, qui avait un insigne blanc. Pour la fin de sa carrière, Lucien Levaux a finalement travaillé chez Adidas" poursuit Claudy Ansenne, désormais photographe amateur. "J'ai l'habitude de retravailler les anciennes photos pour les ramener au goût du jour. Il est donc d'autant plus dommage de ne pas avoir cette photo avec Pelé."

C'est donc en Belgique que Marcel Ansenne a poursuivi sa vie de footballeur. "J'ai joué à Blegny en promotion, avant de partir à Flémalle et de revenir à Blegny. J'ai ensuite rejoint Saint-Remy, avant de souffrir d'une déchirure des ligaments croisés. Tout s'est arrêté comme cela. Je me suis fait opérer à trois ou quatre reprises. Aujourd'hui encore, je dois porter une prothèse. Je me suis déjà dit plusieurs fois que j'aurais dû partir au Brésil et tenter ma chance. Avec le recul, je me dis que mes parents ont finalement bien fait de me forcer à rester ici."

A la fin du diner, deux personnes ont débarrassé la table. C'était ma mère et Pelé"

"Quelque chose m'a profondément marqué avec Pelé" conclut Claudy Ansenne, le frère de Marcel. "A la fin du diner, deux personnes ont débarrassé la table. C'était ma mère et Pelé. Il avait insisté pour le faire. C'est le signe que c'était un très grand Monsieur, tout comme l'était Lucien Levaux. Monsieur Levaux ne m'a jamais considéré comme le fils de sa femme d'ouvrage. Je faisais partie de sa famille. Il m'accompagnait partout, notamment dans les vestiaires. Il m'appelait 'petit gamin' et je lui adresse un grand merci."

En plus d'être un immense joueur de football, Pelé était également un immense homme au grand cœur. Près de 50 ans après leur rencontre, Marcel et Claudy Ansenne se souviendront à tout jamais de leur rencontre avec la légende du football.

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