Interview Tout le monde aide Michel Bigirimana (Sprimont), l’ami Zougoulou

Fabian Lacasse
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Tout le monde aide Michel Bigirimana (Sprimont), l’ami Zougoulou
Photo: © SC

Quand ce grand garçon timide a débarqué l’an dernier, en provenance du DC Cointe, qu’il avait largement aidé à monter en deuxième provinciale liégeoise, la plupart des dirigeants, supporters et même joueurs de Sprimont étaient logiquement sceptiques...

Quand ce grand garçon timide qu’est Michel Bigirimana a débarqué l’an dernier, en provenance du DC Cointe, club qu’il avait largement aidé à obtenir son ticket à l’étage supérieur à la… troisième provinciale liégeoise, la plupart des dirigeants, supporters et même joueurs de Sprimont-Comblain étaient légitimement sceptiques. Certes, sa réputation était plutôt flatteuse, mais digérer trois ou quatre niveaux hiérarchiques, ce n’est pas rien. Surtout pour quelqu’un qui maîtrise mal la langue, qui ne connaît personne et qui est en outre d’un naturel particulièrement discret, voire timide.


Neuf mois plus tard, le gentil Michel constitue rien moins que l’une des principales révélations de la saison au sein du club carrier. De l’avis général recueilli auprès de ses partenaires, il s’est très vite imposé dans un noyau où la concurrence était pourtant rude. Pour sa gentillesse, car Michel, tout le monde l’aime, mais surtout par ses qualités footballistiques.

« Au Burundi, je jouais en première division », me confie-t-il.


Au Burundi… Son pays, qu’il a quitté précipitamment en laissant sa famille derrière lui. C’est sans doute ce qui explique cette espèce de vague à l’âme que l’on ressent lorsque l’on discute un peu avec lui et que l’on prend la peine de gratter la couche de vernis que dissimule son éternel sourire.

Au quotidien, Michel est confronté à une réalité cruelle. Sa solitude, son manque de repères dans une organisation économique et sociale si radicalement différente de celle qui régit l’Afrique de son enfance, une foule de tracas quotidiens. Et puis son histoire et ses souvenirs. Terribles.

Pour préparer ce portrait-interview, j’ai procédé, comme je le fais toujours, à une brève recherche de documentation sur internet. Sur le moteur de recherche Google, à « Michel Bigirimana », on trouve une foule d’articles célébrant ses exploits sportifs récents. Perdus parmi ceux-ci, un document qui ne manque pas d’attirer l’attention. Il émane de l’organisation internationale de défense des droits de l’homme Amnesty International et s’inscrit dans la rubrique Actions urgentes, tortures et mauvais traitements. Edifiant. Voyez plutôt…

http://www.amnesty.org/en/library/asset/AFR16/017/2003/en/8d29b74e-fac7-11dd-b6c4-73b1aa157d32/afr160172003fr.pdf


Mal à l’aise, maladroit sans doute, je tente d’évoquer ce chapitre avec l’intéressé, en essayant de faire preuve du plus de tact possible. A la question « c’était toi ? », il me répond, simplement, pudiquement, « oui ». Emotion. Tout le monde aime Michel. Moi aussi…

 

 

Résumez votre parcours footballistique.

Michel Bigirimana : Je ne joue au football en Belgique que depuis peu. La saison dernière, en P3 au DC Cointe, j’étais aligné à la pointe de l’attaque, sur l’aile gauche ou un peu en retrait et ça n’a pas mal fonctionné puisque j’ai inscrit environ 25 buts. Cela m’a valu d’être remarqué par plusieurs clubs de niveau supérieur dont Sprimont, pour lequel j’ai opté et où je suis arrivé en août dernier (ndlr : en réalité, Michel ne parle pas autant que cela, j’ai pris la liberté – et je vous pris de m’en excuser – de remplir certains blancs).

 

Quel est votre meilleur souvenir à ce jour ?

M.B. : Le passage éclair de la P3 à la promotion… Et j’espère que ce n’est pas fini !

 

Et le pire ?

M.B. : (il n’hésite pas une seconde) Notre récente rencontre à Faymonville. J’ai raté deux occasions immanquables et nous avons été battus 2-0 (il roule des yeux catastrophés).

 

Etes-vous satisfait de votre saison ?

M.B. : Je suis ravi d’avoir été bien intégré dans le groupe. Sportivement, ça m’a paru très dur au début. J’ai dû m’accrocher pour acquérir le rythme, car la différence de niveau était sensible. Aujourd’hui, ça va. Franchement, j’éprouve beaucoup de plaisir à défendre les couleurs de Sprimont. Je suis fier également de figurer, avec Morad Andich, parmi les meilleurs buteurs du club cette saison. J’en ai compté une petite dizaine…

 

Quid de votre contrat ?

M.B. : J’ai signé pour trois ans, donc il m’en reste au moins deux.

 

Comment envisagez-vous personnellement la saison prochaine ?

M.B. : J’espère évidemment que nous accéderons à la D3 ; j’y crois fermement, mais je crains qu’il nous faille pour cela passer par le biais du tour final (ndlr. l’interview a eu lieu avant la fin du championnat). En ce qui me concerne, je voudrais apporter plus à l’équipe, sur le plan offensif, mais surtout sur le plan défensif.

 

Pourquoi, est-ce là que vous situez votre principal défaut ?

M.B. : Oui, c’est vrai. Heureusement, je crois que ça commence à s’améliorer. J’ai confiance qu’avec le soutien du coach, ça ne peut qu’aller de mieux en mieux.

 

Quelle est votre première qualité footballistique ? Et votre place de prédilection ?

M.B. : Le jeu technique, sans doute. Pour le reste, je me sens à l’aise avec les positions les plus offensives.

Phil Médery, son entraîneur, évoque une anecdote à ce sujet : Je ne connaissais pas encore Michel depuis une semaine quand je lui ai expliqué que, dans ma conception du foot, la position de numéro dix qu’il revendiquait n’avait pas d’avenir. Pour ne pas le décevoir, j’ai néanmoins embrayé en lui assurant qu’il serait mon « futur numéro 10 ». Pour je ne sais quelle raison, c’est resté comme une blague entre nous…

 

Qu’est-ce que vous foutez quand vous ne footez pas ?

M.B. : Je suis une formation en peinture. Le reste du temps, je regarde la télé. J’aime bien les films…

 

 

Et ce qu’il n’a pas dit...

 

Zougoulou. C’est son surnom, tiré de la Zouglou Danse du groupe Magic System. « Quand Mikail Ince a rejoint le groupe, il s’est étonné qu’on appelle toujours Michel « Zougoulou ». Nous lui avons alors expliqué avec sérieux que son vrai nom était Michel Zougoulou Bigirimana. Nous l’avons fait avec une telle conviction que Mike le croit sans doute toujours aujourd’hui », se marre Morad Andich.

 

Confident. Morad est à la fois son voisin, son confident et son inspirateur. D’ailleurs, si l’on en croit les très caustiques François Rouffignon et Christophe Verbeeren, « neuf passes sur dix de Michel sont destinées à Mo ! ». Mais ne croyez pas tout ce qu’on vous dit…

 

Co-voiturage. « Vous savez, me confie Morad, la vie ici n’est pas toujours facile pour lui. Dans la mesure du possible, j’essaye de l’aider. A l’occasion, on dîne ensemble. Comme il ne conduit pas, on lui fait profiter de nos services de covoiturage avec Semih Calli ou Macedo Varela-Gomes… C’est un garçon très attachant. Quand on voit bien que ça va moyen-moyen et qu’on se soucie à voix haute de son état d’esprit, il répond invariablement pas un sourire et un pouce levé…

 

Pouce(s). Cette autre caractéristique marquante de Zougoulou est visible de tous. Quel supporter digne de ce nom ne l’a en effet pas vu, suite à la réprimande, une gueulante ou à un repositionnement de son coach, adresser son plus beau sourire à Médery, tout en levant un ou deux pouces à son endroit, histoire de lui montrer qu’il a bien compris le message. Ca, c’est tout Michel… Comment lui en vouloir ?

 

Hyper-calme. Yannick Woos, qui passe pour l’un des plus sérieux du vestiaire, témoigne : Michel est calme. Hyper calme. En fait, il ne dit jamais rien. Pas un mot. On ne l’entend pas. Mais son intégration a été largement facilitée par ses qualités footballistiques. Il en est bourré et l’a d’ailleurs prouvé. Ses vertus humaines font le reste : tout le monde l’apprécie.

 

 

Propos recueillis

Par Fabian Lacasse

 

 

 

 

Carte de visite :

 

Prénom : Michel

Nom : Bigirimana

Age : 26 ans

Club : R. Sprimont-Comblain Sp.

Numéro : 12, mais… « futur numéro 10 »

Surnom : Zougoulou

Position : Milieu central offensif, soutien d’attaque, attaquant en retrait

Carrière : D1 burundaise, DC Cointe (P3 liégeoise), Sprimont (1ère saison).

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