Romain Veys "le football chilien gagne à être connu"

Olivier Baute
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Romain Veys "le football chilien gagne à être connu"
Photo: © SC

L'ambassadeur chilien est ... Belge. Belge, mais passionné du continent américain. Romain Veys vous surprendra pas ses connaissances pointues. Un incollable! Vous découvrirez d'ailleurs également ses analyses sur d'autres formations dans les jours à venir, mais place au Chili!

Wf: Quel est ton rapport personnel avec le Chili, pourrais-tu te présenter à nos lecteurs?

Grand amateur du continent sud-américain, j'ai eu l'occasion de voyager là-bas pendant plusieurs mois. Mais si je n'ai jamais franchi la frontière qui me séparait du Chili, ce-dernier est pourtant l'un des pays de ce continent que je connais le mieux ! Il faut dire que ce pays possède une histoire ainsi qu'une place particulière en Amérique du Sud.
 
Si je n'étais pas né pour vivre cette époque ou que j'étais du moins trop jeune pour la comprendre, le coup d'état d'Augusto Pinochet suivi de la sanglante dictature jusqu'au début des années 90 a sensiblement et durablement marqué un pays qui tarde encore aujourd'hui à faire table-rase d'un passé qu'il préférerait oublier. Cela n'a pas empêché le pays de se développer considérablement ces dernières années, au point de devenir l'une des puissances économiques les plus importantes de la région.
 
Où que vous alliez en Amérique du Sud, vous trouverez une trace du Chili. Dans les entreprises de transports, dans l'industrie minière et même dans les sociétés gestionnaires des grands sites touristiques comme le Macchupichu au Pérou. Il faut dire que la politique économique du pays et les bonnes relations établies par divers traités d'échange avec l'Union européenne en 2002 et les USA en 2003 a permis au pays de se développer plus rapidement que ses voisins, voisins sur le territoire desquels les grosses sociétés chiliennes sont désormais bien implantées. Bref, le Chili est en pleine expansion économique.
 
Mais qu'en est-il du football ? Contrairement à d'autres nations du continent, le Chili n'a jamais vraiment disposé d'une équipe de stars, ou en tous les cas de joueurs ayant fait la une des médias européens. Car hormis la fameuse paire d'attaquants Marcelo Salas / Ivan Zamorano, lesquels ont marqué le football européen de la fin des années 90, l'un à la Lazio, puis la Juve, l'autre à l'Inter après avoir fait les beaux jours de Seville et du prestigieux Real Madrid, peu nombreux sont les joueurs chiliens qui ont percé sur le Vieux Continent. 
 
A l'heure actuelle, Alexis Sanchez et Arturo Vidal sont les plus belles réussites de la Roja de ce côté-ci de l'Atlantique. Mais derrière ces deux joueurs, c'est un peu plus flou. Pourtant, le football chilien est lui aussi en pleine expansion. La victoire de la Universidad de Chile en finale de la Copa Sudamericana 2011 (l'équivalent sud-américain de l'Europe League chez nous) en est un exemple notoire. Et si son surnom de la Roja lui vient avant tout de la couleur rouge qu'arborent ses tuniques, la sélection chilienne est de temps à autre comparée depuis peu à la Roja d'Espagne.

Bref, le football chilien n'est sans doute pas le plus connu en Europe, mais il gagne à être connu !
 
pourquoi le Chili ne serait-il pas la surprise de ce Mondial ?


Wf: Quelles sont les attentes autour de la Roja?

Derrière le Brésil et l'Argentine, ils sont nombreux les pays qui pourraient composer le podium des meilleures sélections d'Amérique du Sud. Si l'Uruguay et la Colombie sont le plus souvent cités par les observateurs pour la troisième marche, le Chili possède les armes pour elle aussi y prétendre. Après avoir terminé troisièmes de la phase éliminatoire continentale (derrière l'Argentine et la Colombie, le Brésil étant qualifié de facto en tant que pays hôte), les hommes de Jorge Sampaoli sont souvent considérés comme des outsiders. Un peu le genre d'équipe qui peut embêter tout le monde, mais à qui il manque ce petit quelque chose qui fait de vous une toute grande équipe. 
 
De plus, il ne sera pas évident de sortir de la phase de poules puisque le Chili fait partie du groupe sans doute le plus relevé de cette Coupe du Monde ! En effet, s'ils veulent passer en huitième, les Chiliens devront se défaire du petit poucet australien mais aussi, et surtout, de l'un des deux finalistes de 2010 : l'Espagne et/ou les Pays-Bas. Pourtant, au pays, on y croit ! Et si le Chili laisse le soin tant aux grosses cylindrées du groupe qu'aux favoris du Mondial de faire la une des journaux, ce n'est pas un hasard. Mais si la victoire finale relève plus de l'utopie qu'autre chose, pourquoi le Chili ne serait-il pas la surprise de ce Mondial ? Car on le sent venir à plein nez : si l'Espagne paraît intouchable dans ce groupe, Alexis Sanchez et ses compatriotes sont prêts à offrir aux supporters Oranje une nouvelle désillusion lors d'un Pays-Bas - Chili qui risque d'être décisif le 23 juin prochain ! 

 
Wf: L'équipe est-elle prête à défier l'Australie?

La chance du Chili, c'est qu'en cas de victoire pour son match d'ouverture contre l'Australie, il mettra d'emblée la pression sur le perdant de l'autre rencontre opposant l'Espagne aux Pays-Bas. En principe, le Chili doit gagner face aux "Asiatiques adoptés" (pour rappel, l'Australie, nation d'Océanie, a disputé les qualifications dans la zone Asie).

Mais le pays tout entier retient actuellement son souffle, car l'une des principales vedettes de la sélection, Arturo Vidal, tarde à se remettre d'une vilaine blessure. Faisant partie du trio indiscutable aux yeux du sélectionneur avec Alexis Sanchez et Gary Medel, le milieu de la Juventus est, il est vrai, un pion essentiel dans le dispositif de la Roja. Cela dit, Vidal n'est pas non plus le véritable dépositaire du jeu chilien et donc son absence, face à l'Australie du moins, devrait pouvoir être palliée sans trop de difficulté. Par contre, l'adjuvant moral (et physique bien sûr) que la présence du numéro 23 turinois peut apporter à ses coéquipiers semble indispensable pour les deux matches suivants.

Valvidia est le véritable dépositaire du jeu chilien



Wf : Si tu devais nous citer un joueur à suivre, lequel choisirais-tu?

Si Alexis Sanchez et Arturo Vidal sont les deux joueurs les mieux connus chez nous, la star locale se nomme Jorge Valdivia. Véritable numéro 10 à la passe tranchante, le joueur de Palmeiras aurait pu réussir une brillante carrière en Europe mais a toujours préféré d'autres cieux. C'est lui le véritable dépositaire du jeu chilien. Après avoir été écarté par son prédécesseur Claudio Borghi en 2011 pour raison disciplinaire, Jorge Sampaoli l'a à nouveau convoqué en 2013, alors que la qualification pour le Brésil était loin d'être acquise. Trois matches et un 7 sur 9 salvateur plus tard, Valdivia avait relancé son pays pour donner le dernier coup de rein nécessaire vers le Brésil. A 31 ans, il possède désormais l'expérience requise pour guider le groupe chilien, tant sur qu'en dehors du terrain.
 
Un autre joueur qui méritera l'attention côté chilien durant ce Mondial, c'est l'attaquant Eduardo Vargas. Véritable renard des surfaces avec la U. de Chile, il n'a pas réussi à s'imposer à Naples et est donc reparti dans son pays natal sur base d'un prêt avant d'émigrer cette année à Valence. S'il n'est pas encore connu du grand public, son style et son punch rappellent un certain Javier Chicharito Hernandez, du côté du Mexique (ou d'Old Trafford). Bref, à 25 ans, Vargas semble désormais prêt à reprendre le flambeau déposé il y a quelques années par ses idoles Zamorano et Salas et exploser dans ce mondial brésilien !
 

Wf: Donne-nous aussi une ou plusieurs raisons de supporter le Chili!
 
Les raisons de suivre le Chili peuvent être nombreuses. Tout d'abord parce que, comme toute nation sud-américaine, le Chili propose un jeu technique, rapide et créatif. Et si cela contraste avec celui qui était le sien lors de la Coupe du Monde organisée sur son sol en 1962, âge d'or de cette sélection qui atteignit les demi-finales, on peut toujours compter sur quelques vieux briscards pour rappeler qu'au Chili, on sait aussi "mettre le pied". Sans doute un vieux souvenir de l'époque où les marins anglais importèrent le football sur le continent via le port de Valparaiso, le plus grand du pays !
 
Ensuite, et contrairement à d'autres sélections sud-américaines, le jeu du Chili se veut plus direct, usant d'un pressing intense et cherchant d'avantage la verticalité que la prouesse technique façon "Brazil". Un football fait de reconversions offensives tonitruantes qui déstabilisent souvent son adversaire.

Enfin, le Chili attend un exploit depuis plus de 50 ans. Depuis cette demi-finale perdue face au Brésil, futur vainqueur de l'édition, en 1962. Sans jamais avoir pu réellement rivaliser avec sa voisine argentine ou l'ogre brésilien, le Chili se rapproche à présent plus que jamais du niveau des Grands d'Amérique du Sud. En allant chercher le sélectionneur argentin Jorge Sampaoli, la Fédération chilienne a d'ailleurs misé sur un entraîneur qui connaît le foot continental comme sa poche. Car si Sampaoli est un inconnu en Europe, il possède une réputation grandissante de l'autre côté de l'Atlantique. C'est aussi lui qui est allé chercher le titre continental en 2011 avec la U. de Chile. Et comme ce Mondial brésilien se présente avant tout comme un "Mondial sud-américain", le Chili possède décidément tous les ingrédients pour devenir la surprise de cette Coupe du Monde. Et le bourreau des Hollandais ou des Espagnols ? La chose n'est pas impossible ..

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