L'Alphabut : la lettre V comme Violence

Dirk Diederich
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L'Alphabut : la lettre V comme Violence
Photo: © SC

L'Alphabut de Dupk passe à la lettre V comme Violence. Un V de souvenirs encore vivaces.

V comme Violence

Je hais toute forme de violence physique. A la limite, je suis presque aussi con que Gandhi. C’est ça, d’ailleurs. Mais je suis un Mahatma houblonné qui trempe sa non-violence dans la pils la plus joyeuse.  J’ai la boisson philanthrope. L’ivresse conciliante. La gueule de bois-ton-verre jusqu’à plus soif. Dès ma première chope, toutes les couleurs se confondent. L’alcool me transforme en daltonien épais. Le supporter passionné de quelque club qu’il soit est mon frère, mon aziz, mon big brother, mon brat en passion. Toutes les écharpes se confondent. Et les raisons de s’écharper fondent comme le glacial Ribéry sous le cul de Zahia la torride.

Je suis au hooligan ce que la limace est au guépard et ce que Lady Gaga est à la chanson à texte : une tarte intégrale quoi, celle qui égaie la comédie burlesque de la vie par ses assauts de crême fraiche inoffensive. Je fais plutôt tache dans un quotidien qui conjugue les violences à tous les temps et tous les modes.

La violence physique, je l’exècre comme tous les abus de pouvoir, comme toutes les lâchetés, comme toutes les disputes de bac à sable à coups de rateaux et de pelles en plastic.

En 1976, au Heysel, j’ai chanté cent et quinze minutes durant avec les supporters de West Ham. J’avais quinze ans. Encore gosse. Gamin chevauchant la comète de l’adolescence. Bon bougre naïf féru de chants anglais et d’anti-mauvisme primaire.

I'm forever blowing bubbles,
Pretty bubbles in the air,
They fly so high,
Nearly reach the sky,
Then like my dreams,
They fade and die...

Je souffle des bulles pour l’éternité, 
De jolies bulles en l’air, 
Elles volent si haut,  
Elles atteignent presque le ciel,
Puis comme mes rêves,                                                                                                                                                             Elles s'effacent et meurent

La soirée passa lyrique, en cantiques portés par dix mille gorges de Hammers enivrés, en plus de la mienne. Mais quand l’adversaire du club londonien marqua le 4-2, tous les chanteurs, sauf moi,  quittèrent le stade comme un seul homme. Je me retrouvai seul dans la tribune Z du Heysel, avec quelques copains que mon père avait invités pour assister à cette finale de Coupe d’Europe. Nous attendions tout bonnement le coup de sifflet final. Dès qu’il retentit, des centaines de Hammers totalement marteaux revinrent dans la tribune et tapèrent de la masse de leurs poings enragés sur nos petites personnes sacrilèges, sur nos présences incongrues dans un stade qui avait vu leurs rêves s’effacer et mourir.

Then like my dreams,
They fade and die...

La figure en sang, l’âme tuméfiée, une dent cassée, un oeil poché, je maudis à jamais ces gros cons abrutis et décidai de ne plus jamais remettre un pied dans un stade de football.

Promesse d’ivrogne, bien sûr. Le sel des larmes ne fait qu’infecter les plaies. L’alcool par contre désinfecte et aide à cicatriser. Cependant, je mis quinze autres années avant de remettre un pied dans un stade.

 

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