L'Alphabut de Dupk : la lettre I

Dirk Diederich
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L'Alphabut de Dupk : la lettre I
Photo: © SC

Dupk poursuit son Alphabut. Il était arrivé à la lettre H. Voici à présent la lettre I comme Ils sont prêts à tout.

I comme Ils sont prêts à tout.

Philippe Collin dirige le Sporting Club d’Anderlecht avec sérieux et application. Avec son cousin Roger Vanden Stock, il forme un duo raisonnable et pragmatique à la tête du club mauve. C’est les Laurel et Laurel du Parc Astrid. Des Laurels qui écriraient hardiment le scénario et la musique de chacune de leurs saisons.

 

Collin est discret. Les traits tirés, le visage sec et ridé, le regard fatigué et patiné d’avoir tant dû frayer son chemin dans l’ombre et la pénombre. Mais les véritables hommes de pouvoir, ceux qu’on appelle les éminences grises, aiment l’ombre. A l’instar des montreurs de marionnettes qui tirent toutes les ficelles de leurs pantins articulés de derrière leur castelet.  Lui, il parle peu. Et encore... uniquement pour des mots lachés sous le couvert du bon sens. La voix et le débit ne trompe personne. Ils sont ceux de la famille Vanden Stock, mais équarris des sourires spontanés et bruxellois du cousin Roger.

 

Au Sporting, Collin tâtonne, effectue des choix, se trompe parfois, puis rectifie immédiatement le tir s’il y a lieu. Il est têtu juste ce qu’il faut pour tenir son rang. Il peut paraître maladroit, légèrement Figaro, maniéré sans en rajouter comme il est de mise aux tables du Saint Guidon. Ancien joueur de l’équipe nationale olympique de Hockey en 1972 aux JO de Munich ( même si à l’époque le hockey en Belgique était aussi peuple qu’une oeuvre de Pierre Boulez), il a un passé de sportif qui fait que l’homme n’est pas la chochotte grise, poudrée et parcheminée que certains se plaisent à voir.

 

Collin chez les mauves, c’est le multi-casquettisme tous azimuths, mais pas de ces casquettes cheaps de chez Mac Do. Plutôt genre Stetson posée par dessus ses yeux de Big Brother. Responsable de la politique des transferts, du scouting et du centre de formation, il est présent dans tous les rouages du club. Chaque grincement de boulon, chaque hurlement d’essieu répond à une de ses initiatives. Espèce de Spiderman transparent, Philippe Collin a tissé durant des années sa toile de relations et de réseaux qui en font un incontournable de la maison mauve et de la maison Belgique. Agents, joueurs et dirigeants de clubs se désaltèrent les esgourdes à l’abreuvoir de ses lèvres. Par exemple, Jacques Liechtenstein est un des agents de joueurs les plus en vue sur le marché belge. Vincent Kompany, c’est lui. Il est aussi, ça tombe bien, le gendre de Philippe Collin comme par ailleurs Oleg Iachtchouk dont les parents s’occupent du centre de Neerpede.

 

Il a le sang mauve qui lui coule dans les veines. Anderlecht est une entreprise familiale qu’il a héritée avec son cousin Roger. Il fait pour le mieux, il place ses pions comme un joueur d’échecs.

 

Depuis vingt ans, la maison mauve, à l’image de son stade, vieillit, parait trop petite à côté de toutes les nouvelles cathédrales européennes. Elle est bien entretenue, néanmoins, ça ne suffit plus. Il faut désormais forcer le cours des événements, comme jadis l’Oncle Constant qui enjamba en Errol Flynn roublard et retors l’encombrant obstacle de Nottingham.

 

L’Union Belge de Football freine les agissements du Sporting qui rêve d’abord d’une Benelux League. « Niet » quasi unanime du gros de l’élite du football belge. Refonte du championnat qui serait ramené à un raout entre dix clubs ? Re-niet de l’Union Belge du football.

 

Les gens de St-Guidon ne se laissent pas démonter comme un vélo d’Eddy Merckx. Dites-leur non, posez-vous en portier intraitable devant la porte du dancing du foot belge et les cocos, malgré leurs costards cravates taillés aux ciseaux du luxe, donnent des coups de bélier pour forcer la porte. Si Saint Guidon est invoqué par le petit peuple pour lutter contre la dysenterie, eux, ils feraient plutôt chier. Et que je t’emmerde ! Et casse-toi pov’ con ! debité avec un accent de ketje sarkozyen.

 

Dans un premier temps, Roger Vanden Stock a bien essayé de s’emparer de la présidence de l’Union Belge. Mais barré par le reste de la Belgique footballistique, il avancera la candidature de François De Keersmaecker, un illustre inconnu, pistonné par sa belle-mère, la veuve de Louis Wouters, l’ancien dirigeant de l’UB. De Keersmaecker a le sourire aussi large que sa méconnaissance du monde du football professionnel. Propulsé dans le ring d’un univers implacable, François, c’est la princesse Mathilde face à Mike Sporting Tyson.  Ah ! Le beau sourire de Mathilde ! Baffe !

 

Dans un second temps, Philippe Collin, à la hussarde, s’empare de la présidence de la Commission technique de l’Union Belge. Un poste de pouvoir que les autres clubs ne refusent pas à cet homme qui passe pour raisonnable et discret. Et là, l’homme efficace et malin du parc Astrid donne dans le répertoire burlesque. Depuis son arrivée à la Maison de Verre, il multiplie les impairs. C’est la cascade presque sans fin de catastrophes. L’Union Belge la joue remake d’Hellzapoppin. Soudain, aucune décision ne semble plus assez délirante. C’est la course à l’absurde. C’est le festival  des aberrations kafkaiennes. C’est diabolique tellement tout ça parait orchestré par la Voix du Maitre. Plus personne ne comprend quoi que ce soit quand on ne crie pas au scandale.

 

Mission accomplie : l’Union Belge est aujourd’hui discréditée jusqu’au trognon. Elle ne fait plus rire. Trop de gags nuisent au sérieux de l’humour. Les clubs professionnels, les six grands peuvent désormais dire la messe à leur guise. Les petits dégageront, s’excuseront de demander pardon. Sous peu, la Belgique, je suis prêt à le parier, organisera une Jupiler League à six.  Comme pour la D1 féminine, son ballon d’essai. Comme les six faces d’un dé qui aurait enfin aboli le hasard.

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